21 juillet 2025
Chaque ville a ses grandes figures. À Roye, l’éducation a longtemps été une affaire centrale, résultat d’un passé turbulent (la ville fut presque rasée pendant la Première Guerre mondiale) et d’une volonté commune de reconstruire, d’instruire et d’élever. Aux détours des deux grandes écoles publiques principales, l'école Jean-Moulin (aujourd’hui du côté de la rue Anatole France) et l’école maternelle Jacqueline Queneau, Roye s’est forgé une réputation solide dès la Troisième République pour la qualité de ses enseignants et de ses méthodes, portées par la laïcité et le progrès.
Difficile de parler d’éducation à Roye sans évoquer Henri Dutrieux. Véritable figure de la Troisième République locale, cet instituteur est nommé en 1884 directeur de l’école des garçons, alors rue de Parthenay. Féru de pédagogie active, il introduit dès 1890 des méthodes « modernes » : sorties pédagogiques au marché, éducation civique sur le terrain, apprentissage par le jeu. Sa devise restée affichée pendant des décennies : « Instruire pour émanciper ». Certains de ses anciens élèves, comme Paul Loiseleur, deviendront à leur tour enseignants ou élus locaux.
Beaucoup se souviennent des années 1960-1980 sous la houlette de Jacques Démaret, principal du collège Louis Pasteur. Arrivé en 1966 dans un établissement à peine reconstruit après-guerre, il pousse à la rénovation des locaux, à l’intégration des sections sport-études et à l’accueil des élèves issus des villages voisins (Andechy, Liancourt-Fosse…). Sous son impulsion, le taux de passage en lycée progresse de 20 % en quinze ans (source : rapport d’inspection académique 1982).
Marie-France Deschamps, institutrice puis directrice à l’école Descartes (puis Jean-Moulin après regroupement), a traversé toute la deuxième moitié du XXe siècle en inculquant rigueur et bienveillance. Surnommée “la Mère Deschamps” par ses élèves, elle est restée célèbre pour ses dictées et ses collectes de bouchons pour les œuvres caritatives. On lui doit aussi plusieurs expositions sur l’histoire de Roye et l’implication de l’école lors des commémorations du 8 mai.
Derrière la façade classique des écoles roysiennes, se cachent souvent des anecdotes étonnantes, transmises à voix basse lors des réunions ou retrouvées au détour d’un vieux registre.
L’éducation à Roye ne se limite pas aux maîtres et maîtresses du passé : elle se conjugue toujours au présent. Plusieurs associations continuent de faire vivre l’esprit de transmission :
En 2023, plus de 90 enseignants titulaires et contractuels étaient en poste dans les écoles, collèges et lycées de Roye (source : Rectorat d’Amiens).
On oublie parfois que l’école, c’est aussi tout un ensemble d’acteurs qui, sans être enseignants de métier, participent à l’éducation au quotidien : surveillants, conseillers principaux d’éducation, agents municipaux, personnels de l’accompagnement. L’une des figures les plus saluées en 2016, lors d’une remise de médaille municipale, fut Mme Yvette Lagache, animatrice périscolaire pendant près de 35 ans, reconnue par des générations d’enfants comme “la deuxième maman du goûter”.
Les établissements scolaires roysiens sont eux aussi des témoins de l’histoire locale :
La relève est déjà à l’œuvre : chaque rentrée, de nouveaux visages arrivent, avec dans leurs valises des projets autour de l’environnement, du numérique ou d’une école « ouverte ». Le partenariat entre le lycée professionnel et les entreprises locales s’est intensifié ces cinq dernières années, aidant à placer chaque année une centaine de jeunes en apprentissage ou stage qualifiant (source : « La Gazette Picarde », 2023).
Roye ne manque ni de talents ni de vocations pour continuer à faire vivre cette tradition éducative, dans ses murs ou sur ses terrains de sport, au cœur de ses ateliers, lors des expositions culturelles, ou à l’ombre des marronniers de la cour de récré. Ceux et celles qui ont choisi d’enseigner, d’encadrer, de conseiller ou simplement d’être là, ont légué bien plus qu’un savoir : une mémoire encore vivante, dont la transmission reste la plus belle victoire.
On est tous l’élève de quelqu’un, non ? À Roye, les souvenirs d’école restent gravés, entre cour et mémoire.