Les personnages majeurs de Roye : Destins, engagements et inspirations

3 juillet 2025

Jacques de Roye : Un noble aux confins du Moyen Âge


En arpentant l’histoire locale, difficile de passer à côté de Jacques de Roye. Seigneur éponyme du XVe siècle, il occupe une place à part dans l’identité de la ville. Même s’il n’a pas connu notre marché du samedi matin ni nos pâtisseries, sa signature se transmet dans la toponymie et les mémoires.

Jacques de Roye (vers 1430-1476) était seigneur de la ville à une époque charnière : la fin de la guerre de Cent Ans, lors du rattachement progressif de Roye à la couronne de France, mais aussi pendant ces années de rivalités franco-bourguignonnes qui ont marqué la Picardie. Fils de Pierre de Roye (un nom qu’on retrouve parfois épelé “Roye” ou “Roys”), il s’est illustré dans les tensions régionales et les tractations avec Louis XI, cherchant à protéger son fief contre les ambitions extérieures.

  • Son château et ses fortifications : Jacques de Roye contribua à renforcer les fortifications de la ville, consolidant ainsi Roye comme carrefour stratégique entre Amiens et Noyon (source : Gallica BnF).
  • Un diplomate féodal : Fin politique, il était aussi diplomate dans les jeux d’alliances seigneuriales de la région, nouant parfois des liens avec les Armagnacs ou les Bourguignons, au gré de la géopolitique mouvante.

Aujourd’hui, si son nom évoque un lointain passé féodal, il n’en reste pas moins le symbole d’une Roye fière, indépendante, et déjà ouverte sur son époque.

Des combattants de Roye : Soldats, héros et mémoires du XXe siècle


S’il est une tradition qui traverse les ruelles de Roye, c’est celle de la mémoire des guerres. La ville, lourdement marquée par les deux conflits mondiaux, a vu ses enfants partir, parfois ne jamais revenir, ou ramener des récits d’héroïsme silencieux.

  • Charles Cacheux (1893-1961) : Né à Roye, ce militaire français fut l’un des pilotes de chasse de la Première Guerre mondiale, obtenant plusieurs victoires aériennes. Il est titulaire de la Médaille militaire et de la Croix de guerre (source : As oubliés 14-18).
  • Albert Billiet : Poilu de la Grande Guerre, il fait partie de ces appelés royens mort au front. Son nom figure parmi les 403 victimes royennes de la Première Guerre sur le monument aux morts.
  • Les résistants de 1940-1944 : Roye, située sur les axes ferroviaires, fut aussi le théâtre d’engagements clandestins. Plusieurs habitants se signalèrent par leur courage, notamment lors de la destruction des installations allemandes en 1944 (voir aussi la base Mémoire des hommes).

On retrouve cet héritage dans les cérémonies du 11 novembre ou dans les rues portant le nom de combattants, rappelant que, chaque famille, de près ou de loin, porte une histoire de soldat ancrée dans le siècle passé.

Maisons religieuses et personnalités spirituelles : Une influence durable


La silhouette imposante de Notre-Dame, les vestiges de l’ancien couvent des Récollets : la vie religieuse a modelé Roye bien au-delà de la simple pratique dominicale. Plusieurs ecclésiastiques royens ou passés par Roye se distinguent.

  • Louis-Marie Rohart (1831-1914) : Prêtre et archiprêtre, il a été une figure humaniste, très investi dans l’éducation et les œuvres sociales à Roye, notamment auprès de la jeunesse ouvrière (source : Archives départementales de la Somme).
  • Sœurs augustines du couvent : Actives jusqu’à la fin du XIXe siècle, elles furent à la fois infirmières et éducatrices – pionnières avant l’heure de l’accompagnement social en ville.

Perpétuant l’esprit d’entraide, la mémoire de ces vies consacrées résonne encore dans le tissu associatif et caritatif local.

Maires bâtisseurs, fers de lance ou novateurs


L’histoire contemporaine de Roye est aussi celle de ses édiles, certains étant restés dans les mémoires comme de véritables moteurs de transformation.

  • Victor Hugo Lemoine (1881-1970) : Maire de 1925 à 1940 puis de 1945 à 1947, il est le principal artisan de la reconstruction de la ville après la destruction totale de Roye en 1918. Dès 1919, il s’est battu pour garantir un urbanisme cohérent et la relance du commerce local.
  • Francis Bellanger (1909-1983) : À la tête de la ville dans les années 1960-1970, il a favorisé le développement des équipements scolaires et sportifs, marquant l’entrée de Roye dans la modernisation après la Seconde Guerre mondiale.
  • Alexandre Formery : Maire en 1876, rédacteur du plan d’alignement, il impulsa le chantier de la modernisation urbaine de la fin du XIXe siècle (voir : “Maires de la Somme”, Archives départementales).

À chaque époque, ces élus ont imprimé leur marque, liant souvent leur nom à une rue, une école ou une salle communale.

Écrivains, artistes, créateurs : l’inspiration royenne


Source d’inspiration et de création, Roye a aussi été le décor ou le point de départ d’œuvres singulières. Plusieurs artistes et écrivains se sont nourris de l’atmosphère locale.

  • Jean-François Lesueur (1760-1837) : Né à Plessis-Belleville mais élève à Roye, ce compositeur a marqué la musique liturgique et l’opéra, et influencé Berlioz. Son passage à Roye est souvent cité dans les biographies musicales (source : Bibliothèque nationale de France).
  • Ernest Prieur (1863-1940) : Poète et instituteur, il a décrit dans ses œuvres des scènes champêtres et la vie locale de la fin du XIXe siècle, donnant une voix sensible aux campagnes royennes.
  • Paul Delance (1848-1924) : Peintre paysagiste, célèbre pour ses tableaux de la plaine picarde, il expose régulièrement à Paris, mais Roye (et ses environs) reste un de ses sujets favoris (Musée d’Orsay, catalogue des expositions 1905-1924).

On retrouve dans ces œuvres le patrimoine, les ciels changeants, et les visages porteurs de l’âme picarde.

L’empreinte de l’Ancien Régime


Bien avant la Révolution, Roye était un bastion essentiel du Santerre, reliée à la cour royale et au clergé.

  • Le baron Jean de Roye (XVIe siècle) : Conseiller de Marguerite de Valois, il manœuvre dans les intrigues de La Ligue, cherchant à défendre les intérêts royens lors des guerres de Religion (source : Gallica BnF, actes notariés).
  • Lécuyer d’Allonville : Propriétaire terrien et notable, il représente Roye à l’Assemblée des États Généraux de 1789, porteur des doléances locales sur le blé et la fiscalité (source : Archives départementales de la Somme).

Leur souvenir atteste la diversité politique et la vitalité sociale de la ville à la veille de la Révolution.

Figures éducatives et maîtres d’école


L’école, à Roye, ce n’est pas qu’une institution : c’est une histoire de transmission et de passion locale. Plusieurs figures d’enseignants ont laissé une marque durable.

  • Ernest Prieur : Déjà cité comme poète, il fut aussi directeur d’école à Roye et pionnier des cours pour adultes dès les années 1890, prônant l’accès à l’instruction pour tous (voir « Le Maitron » VII).
  • Mlle Bouvet : Directrice de l’école de filles (1903-1928), elle joue un rôle majeur dans l’émancipation éducative des filles à une époque charnière (source : Archives municipales de Roye).

Entre rigueur républicaine et bienveillance, ces professeurs sont de véritables balises dans la mémoire collective locale.

La flamme de la résistance et des engagements civiques


À travers les grandes crises, Roye a su donner naissance à des résistants ou personnalités engagées. Lors de la Seconde Guerre mondiale, par exemple, les réseaux d’aide aux évadés et aux familles juives furent actifs.

  • René Demailly : Figure locale de la Résistance, arrêté en 1944, il paiera de la déportation son engagement pour la liberté (source : Fondation pour la Mémoire de la Déportation).
  • Famille Duflos : Plusieurs membres hébergèrent et protégèrent des personnes recherchées, actant un courage discret mais précieux.

On retrouve souvent chez ces figures l’humilité et la discrétion, typiques de l’engagement picard.

Roye, une mosaïque de destins


À travers ces portraits, une évidence s’impose : l’histoire de Roye n’est pas constituée de grands noms isolés, mais de destins mêlés, d’actions collectives et de petites lueurs qui, ensemble, éclairent le présent. À chaque coin de rue, une trace subsiste : un nom gravé, une plaque, un souvenir partagé lors des fêtes du patrimoine. C’est ce tissu vivant, ancré dans l’engagement, la création, et la fidélité à une terre, qui donne à Roye son énergie singulière. Alors, la prochaine fois qu’on croise le regard d’une vieille photo de classe, d’un monument, ou la façade d’une maison du XVIIIe siècle, on saura que c’est tout un pan de notre histoire qui nous sourit.

Pour aller plus loin : Site du département de la Somme – Histoire et patrimoine, Gallica BnF, Archives municipales de Roye.

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